La nouvelle série « Tapie » sur Netflix ravive les souvenirs de l’emblématique Bernard Tapie et sa non moins fameuse technique de rachat d’entreprises : acquisitions audacieuses à la barre du tribunal pour un franc symbolique, coups de maître négociés à coup d’une rhétorique brillante… De là à parler d’une « méthode Tapie », il n’y a plus qu’un pas… Cette méthode est-elle toujours d’actualité ? Selon Rivalis, rien n’est moins sûr…
De l’imprimerie Diguet-Deny à Adidas
L’ascension fulgurante de Bernard Tapie, de la reprise d’une modeste imprimerie en Normandie à l’acquisition emblématique d’Adidas, est bien la marque d’un parcours d’entrepreneur hors norme, autant par ses déboires juridiques que par son sens aigu des affaires. Cette trajectoire unique est au cœur de la mini-série « Tapie », disponible depuis le 13 septembre sur Netflix.
Matthieu Stefani, serial entrepreneur et créateur du podcast Génération Do It Yourself, souligne l’impact de cette série : « Cette série a rouvert les yeux sur la reprise d’entreprise, qui était un peu l’enfant oublié ces dernières années ». Dans un contexte où un rapport du Sénat d’octobre 2022 prévoit la cession de quelque 700 000 entreprises dans la prochaine décennie, l’exemple de Tapie, bien que difficilement transposable à notre époque, offre une réflexion nouvelle sur les approches de l’entrepreneuriat moderne.
L’incarnation du panache entrepreneurial à la française
Se remémorant l’impact de Bernard Tapie, Matthieu Stefani le décrit comme « l’un des entrepreneurs les plus connus de France ». Tapie, reconnu pour son ambition sans limites, n’hésitait pas à s’engager dans des projets d’envergure, qu’il s’agisse de création ou de reprise d’entreprise. Sa capacité à toujours trouver un moyen de rebondir, même face aux échecs, est devenue quasi légendaire, tant dans la réalité que dans la fiction.
Le charisme de cet homme d’affaires, capable de galvaniser les foules, transparaît notamment dans son émission « Ambitions », rebaptisée « Réussite » dans le biopic de Netflix, et dans sa célèbre publicité pour les piles Wonder – un de ses plus grands succès financiers, après avoir racheté puis revendu la société entre 1984 et 1989. Encore aujourd’hui, Bernard Tapie reste une source d’inspiration pour quiconque aspire à entreprendre. A ce propos, Caroline Dumond, du réseau d’incubateurs Les Premières, analyse l’impact de la série Netflix : « La série a montré que le fils d’un lambda peut s’élever dans les sphères économiques et même politiques ».
Mythes et réalités de la reprise d’entreprise à 1 euro
En 1978, Bernard Tapie se fait remarquer par le rachat de l’imprimerie normande Diguet-Deny pour un franc symbolique, une méthode qui, à première vue, semble presque trop belle pour être vraie. En cause : cette approche requiert un apport financier minime et un plan de redressement solide. Bien que le rachat pour un euro symbolique soit encore techniquement possible aujourd’hui, il n’en reste pas moins complexe… Matthieu Stefani avertit : « Ce n’est pas aussi simple. Ce n’est pas avec un euro qu’on sauve une entreprise en difficulté ».
Or, Tapie avait un intérêt particulier pour les entreprises en difficulté, principalement pour le potentiel de plus-value sur leurs actifs. Cela dit, cette technique s’avère particulièrement difficile à appliquer dans le contexte actuel. Jean-Dominique Daudier de Cassini, avocat spécialisé dans le redressement d’entreprise, est catégorique : « La méthode Tapie, on ne peut plus l’utiliser ». Tapie avait pour habitude de racheter des entreprises en difficulté, mais avec des actifs significatifs, ce qui lui permettait de les exploiter, soit par la vente, soit par la mise en place de financements adossés à ces actifs. En outre, il s’appuyait sur un processus judiciaire lui permettant d’étaler le remboursement des dettes ou même de renégocier leur montant avec les créanciers, réduisant ainsi leur valeur et libérant du capital pour l’acquisition d’autres sociétés. Le gros avantage de cette stratégie ? Eh bien elle lui offrait une marge de manœuvre financière pour étendre son empire entrepreneurial vie le rachat d’autres sociétés !