La rénovation énergétique des logements français connaît un tournant majeur avec l’évolution du dispositif MaPrimeRénov’. Au cœur de cette transformation, le chauffage au bois domestique se retrouve sous les feux des projecteurs.

Alors que ce mode de chauffage a joué un rôle prépondérant dans le succès du programme depuis son lancement en 2020, les modifications envisagées concernant la prime renov liée au chauffage bois soulèvent de nombreuses interrogations. Entre enjeux environnementaux, préoccupations sociales et impacts économiques, la refonte de MaPrimeRénov’ cristallise les débats autour de l’avenir de la transition énergétique en France.

Le chauffage au bois, pilier méconnu de la rénovation énergétique

Le chauffage au bois s’est imposé comme un acteur incontournable de la rénovation énergétique en France. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : près d’un tiers des travaux financés par MaPrimeRénov’ entre 2020 et 2022 concernaient cette source d’énergie. Ce succès s’explique en partie par son accessibilité financière, particulièrement appréciée des ménages modestes, notamment dans les zones rurales où les alternatives énergétiques se font plus rares ou onéreuses.

De surcroît, le bois-énergie présente des atouts non négligeables en termes d’impact environnemental. Considéré comme une énergie renouvelable, il participe activement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Son utilisation permet également de valoriser les sous-produits de la sylviculture, contribuant ainsi à une gestion plus durable des forêts françaises.

Néanmoins, le tableau n’est pas sans ombre. La combustion du bois génère des émissions de particules fines, source de préoccupations sanitaires grandissantes. Ce constat pousse les autorités à repenser le soutien accordé à cette filière, tout en cherchant à promouvoir les installations les plus performantes et les moins polluantes.

Les nouvelles orientations de MaPrimeRénov’ : entre ambitions et inquiétudes

montant des aides diminuees de 30% pour le bois applicable au 1er avril 2024Face aux défis climatiques et sanitaires, le gouvernement a décidé de revoir sa copie concernant MaPrimeRénov’. Les modifications apportées au dispositif visent à rééquilibrer le soutien entre les différentes technologies de chauffage renouvelable. Concrètement, cela se traduit par une baisse de 30 % des barèmes d’aides pour l’installation d’appareils de chauffage au bois depuis le 1er avril 2024.

Cette décision a suscité de vives réactions, notamment de la part du député Éric Girardin. Ce dernier s’inquiète des conséquences potentielles sur les ménages les plus modestes, pour qui le chauffage au bois représente souvent une solution économique incontournable.

L’introduction envisagée d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) obligatoire pour les logements classés F et G cristallise particulièrement les craintes. En effet, cette nouvelle exigence pourrait constituer un frein financier et administratif supplémentaire pour des propriétaires aux revenus limités.

Au-delà des considérations sociales, c’est toute une filière économique qui s’inquiète. Le secteur du bois-énergie domestique, fort de ses 40 000 emplois et de sa contribution de 3,2 milliards d’euros à l’économie française, redoute les répercussions de ces changements sur son activité.

Face à ces préoccupations, le gouvernement tente de rassurer. Il affirme que malgré la baisse des aides, le chauffage au bois reste compétitif sur le long terme grâce à ses faibles coûts de fonctionnement. De plus, des mesures transitoires ont été mises en place pour adoucir l’impact des changements. Ainsi, la possibilité de bénéficier de MaPrimeRénov’ par geste, indépendamment de l’étiquette énergétique du logement, a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2024. De même, l’exigence du DPE a été temporairement suspendue jusqu’à la même date.

Le défi de la qualité de l’air : concilier chauffage au bois et santé publique

L’un des enjeux majeurs de la refonte de MaPrimeRénov’ réside dans la gestion des émissions de particules fines liées au chauffage au bois. Selon l’ADEME, cette source d’énergie est responsable d’environ 43 % des émissions de particules fines PM2.5 en France. Cette réalité pose un véritable défi en termes de santé publique, obligeant les pouvoirs publics à trouver un équilibre entre le soutien à une énergie renouvelable et la préservation de la qualité de l’air.

Pour répondre à cette problématique, le gouvernement mise sur l’innovation et le renouvellement du parc d’appareils de chauffage. L’accent est mis sur l’accélération du remplacement des vieux équipements, tels que les cheminées à foyer ouvert ou les inserts anciens, au profit d’installations plus performantes et moins polluantes. Cette stratégie vise à maintenir les avantages du chauffage au bois en termes d’émissions de gaz à effet de serre tout en réduisant significativement son impact sur la qualité de l’air.

Parallèlement, des efforts sont déployés pour sensibiliser les utilisateurs aux bonnes pratiques d’utilisation du chauffage au bois. Cela passe par la promotion de combustibles de qualité et l’éducation sur les techniques d’allumage et d’entretien des appareils. Ces actions, combinées au soutien ciblé pour l’acquisition d’équipements performants, constituent les piliers de la stratégie gouvernementale pour réconcilier chauffage au bois et qualité de l’air.

Vers un équilibre entre transition énergétique et enjeux sociaux

La refonte de MaPrimeRénov’ témoigne de la complexité des défis auxquels fait face la politique de rénovation énergétique en France. D’un côté, l’urgence climatique pousse à accélérer la décarbonation du secteur du bâtiment, responsable de 18 % des émissions de gaz à effet de serre dans l’Hexagone. De l’autre, la nécessité de maintenir l’accessibilité énergétique pour tous les ménages, en particulier les plus modestes, s’impose comme une priorité sociale incontournable.

Dans ce contexte, le gouvernement cherche à tracer une voie médiane. Il réaffirme son soutien au chauffage au bois, reconnaissant sa contribution aux objectifs énergétiques et climatiques nationaux. Toutefois, ce soutien se veut désormais plus ciblé, favorisant les installations les plus performantes et les moins polluantes. Comme l’explique la société Topchaleur, leader sur l’eCommerce de poêles à bois, le système de chauffage bois doit être labellisé flamme verte 7 étoiles et équivalent pour les poêles, insert ou 5 étoiles et équivalent pour les chaudières. Cette approche vise à concilier les avantages du bois-énergie en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de maîtrise de la pointe électrique, tout en s’attaquant à la problématique des particules fines.

L’évolution de MaPrimeRénov’ pour le chauffage au bois s’inscrit ainsi dans une réflexion plus large sur l’avenir de la transition énergétique en France. Elle soulève des questions cruciales sur la manière de conjuguer efficacité environnementale, justice sociale et dynamisme économique. Les mois à venir seront déterminants pour évaluer l’impact réel de ces changements et, le cas échéant, apporter les ajustements nécessaires pour atteindre cet équilibre délicat.

Sources :
https://www.economie.gouv.fr/cedef/maprimerenov
https://www.anah.gouv.fr/sites/default/files/2024-02/202402_Guide_des_aides_WEB.pdf?v=1708621659 (page 14, nouveaux montants en italique)